Sylvie Orsini, romans

Bain pour Deux à Baracci

Les Geais Editions

Imprimé en juin 2017 ISBN : 978-2-9546900-3-2

Le synopsis

Lasse de composer avec l’existence d’un homme qui l’anesthésie, lasse de se complaire dans une vie bien rodée, mais terne, plate et sans rebondissements, Nadejda va bouleverser les idées reçues, renoncer à ses certitudes et décide de partir à l’aventure pour amorcer un nouveau départ.
Déterminée dorénavant à n’avoir plus à rendre de comptes qu’à elle-même, elle se lance corps et âme dans un avenir qui, bien qu’incertain est chargé d’un espoir : rebondir plus haut, sous le ciel accueillant de Corse. Son projet : se reconstruire en même temps qu’elle contribue à la renaissance du fameux Grand Hôtel de Baracci, mais sa rencontre inopinée avec un être à part, va littéralement mettre son coeur en miettes, l’amener très vite à redescendre sur terre et à se remettre à nouveau en question.

Sylvie Orsini

Sylvie Orsini

A quarante-cinq ans, « Meilleur Ouvrier de France » dans l’Art de la faïence, elle troque les pinceaux pour la plume. Italienne d’origine, elle réside à Folelli, en Corse, depuis vingt-cinq ans, à l’orée de la Castagniccia. Elle y partage ses passions avec son mari et ses deux enfants.

Notes de l’auteure

Il n’y a rien de pire que d’être contraint de mettre un terme à une histoire alors que l’on est conscient qu’elle n’est pas finie. À peine avais-je terminé le chapitre 44 que j’allais m’engager dans le chapitre 45. Eh bien non, il me fallut arrêter là, parce qu’après le 45ème il m’aurait été impossible de réfréner mon ardeur à poursuivre.
À mi-chemin, je savais déjà qu’il y aurait une suite. C’était inévitable, parce que je ne pouvais me lasser des perpétuelles chamailleries entre Rodolphe et Nadejda. J’en avais presque oublié le chantier de Baracci, et pourtant, il avançait bien.
Pourquoi ai-je eu envie d’imaginer la renaissance de son Grand Hôtel, avec, pour toile de fond, une histoire d’amour ?
Parce que d’aussi loin que remontent mes souvenirs de foires en compagnie de mon cher époux sur le site des bains de Baracci, j’ai toujours été fascinée par cet édifice et par ses magnifiques fresques, et surtout chagrinée de voir ce digne représentant de la fin d’une époque, complètement laissé à l’abandon.
Lorsque j’ai appris que ces œuvres avaient été réalisées par un peintre russe et combien dramatiques avaient été les circonstances qui avaient amené cet homme à débarquer en Corse dans les années vingt, mon imagination n’a cessé de croître.
Je voulais absolument que mon héroïne soit une restauratrice de fresques, de surplus, d’origine russe et qu’ainsi, il y ait un lien avec les émigrés du « Rion ».
Mon objectif, à travers ce récit, était de rendre hommage au travail admirable de cet artiste et de faire revivre l’univers des bains, mais jamais je n’aurais pu imaginer à quel point la tâche aurait pu être aussi ardue.
Je dois reconnaître que vers la fin de cet ouvrage, j’étais fatiguée. Mon cerveau fonctionnait à la manière de ma box, par intermittence : réseau, pas de réseau, j’avais du mal à me reconnecter. Je ne savais pas quel final donner à ce premier tome alors que l’ensemble des travaux du site n’étaient pas encore achevés ; j’ai donc pris la résolution de laisser à Évelyne et à sa copine Véronique le soin d’apporter les dernières touches aux fresques de l’hôtel, pendant que Nadejda, allait poursuivre, de son côté, une tout autre destinée.

Le grand Hôtel de Baracci

Le grand Hôtel de Baracci

Sylvie Orsini dédicacera l’ouvrage à la grande foire de Baracci début août 2017, et par la suite le livre sera en vente aux Bains de Baracci
Bain pour deux à Baracci
Bain pour deux à Baracci

Extraits du roman Bain pour Deux à Baracci

……………Chap.5……………

– Mais où étais-tu donc passée ? Cela fait plus de deux heures que nous essayons de te joindre sur ton portable, d’autant plus que Gilles n’a pas su nous dire où tu pouvais bien te trouver.
– Je suis allée voir grand-mère.
– Jusqu’à maintenant ? Vous aviez tant de choses que ça à vous dire ?
Elle ignora le ton ironique avec lequel il parlait lorsqu’il était question d’Olga.
– Elle va bien. Elle m’a dit de vous passer le bonjour. Cela lui ferait plaisir de voir un peu plus souvent maman.
– Ta mère fait ce qu’elle peut. Elle a du travail. Si elle a envie de la voir plus souvent, elle n’a qu’à venir vivre à la maison.
C’était toujours la sempiternelle rengaine : il utilisait inlassablement les mêmes arguments pour lui faire comprendre que la discussion n’irait pas plus loin, quand il s’agissait d’Olga. Comme elle ne tenait pas non plus à alimenter la polémique, Nadejda félicita sa maman, qui venait de les rejoindre, pour sa nouvelle coupe de cheveux. À cinquante-deux ans, elle en paraissait dix de moins avec son visage de poupée russe, lisse et rond, ses pommettes hautes et ses longs cils qui soulignaient la profondeur de ses yeux émeraude. Elle ne put s’empêcher de songer aux paroles de sa grand-mère. « Et si maman avait une liaison ? »
Alors qu’elle avait si longtemps cru être le fruit d’une relation adultère, paradoxalement, cette idée lui semblait à présent déplacée, voire indécente. Elle la chassa aussitôt de son esprit comme une fumée dérangeante, de peur que sa mère ne devine l’objet de ses pensées.
La ride sur le front de son père se transformait peu à peu en crevasse. Finalement, il prit la parole.
– On peut savoir ce que tu lui as encore fait à ce pauvre Gilles ? Il avait l’air d’un malheureux chien battu, au téléphone. Je me demande comment il fait pour te supporter.
– Je ne lui ai rien fait de spécial, papa. Il commence tout juste à réaliser que je ne suis pas la femme qu’il lui faut. Nous ne poursuivons pas les mêmes objectifs, c’est tout.
– Ah bon ! Parce que tu as d’autres objectifs, à bientôt trente ans, que celui de fonder une famille à ton tour ? Gilles s’était empressé de lui faire part de l’objet de leur dernière dispute. Ne voulant pas se laisser emporter par ses émotions, elle réfléchit un instant à la meilleure manière de répondre.
– Il se pourrait, papa, que j’aie d’autres aspirations, et cette fois, j’ai bien envie de me donner les moyens de les satisfaire. De toute manière, avant de vouloir fonder une famille, il aurait fallu que Gilles et moi nous ayons envisagé, ne serait-ce qu’une seule fois, le projet de nous marier. Qu’en penses-tu ? Apparemment Gilles t’a choisi comme confident, t’a-t-il déjà fait part de son souhait de m’épouser ?
– Non, et alors ?
– Tu trouves ça normal, toi qui n’arrêtais pas de presser maman pour qu’elle t’épouse ?
– Normal, normal…, moi j’avais une autre vision des choses, marmonna-t-il, tout en remuant la tête.
– De nos jours, pour ce qui est des engagements, tu es bien placée pour savoir que rien ne presse. Le mariage n’est plus vraiment dans l’ordre des choses, Nadejda. Question d’époque et d’évolution des mentalités. Ton frère vit depuis sept ans en concubinage avec Irina, ils ont trois enfants et ils n’ont pas l’air de vouloir passer ni devant monsieur le maire ni devant monsieur le curé. Toi, idem. J’ai fini par m’y habituer. Ça fait faire des économies, en tout cas. Fais-lui ce gosse à ce brave Gilles, et, comme cadeau de naissance de votre premier, si tu y tiens vraiment, demande-lui de t’épouser. Un cadeau, ça ne se refuse pas. N’est-ce pas ?
Il adressa un regard complice à sa femme, qui suivait docilement la conversation et ne s’était pas encore exprimée sur le sujet. La jeune femme était habituée à ce regard neutre, sans expression. Inutile de chercher un soutien quelconque auprès de sa mère quand son père dirigeait la conversation.
– Non, papa, je regrette de vous faire de la peine, mais Gilles et moi, c’était une erreur. Nous ne sommes pas faits l’un pour l’autre, et encore moins pour vivre toujours ensemble ; ce serait une gageure. Étant le principal intéressé, j’aurais préféré qu’il soit le premier informé de ma décision, mais, comme toujours, il préfère vous envoyer en éclaireur pour tester le terrain. Quoi qu’il en soit, j’ai bel et bien l’intention de le quitter.
Boris se leva d’un bond.
– Quoi !!! Mais tu es tombée sur la tête ou quoi ?
Tout le monde craignait les explosions de colère de Boris, mais pas Nadejda, qui le fixait avec défi, sans rien dire.
Son père leva les bras, exaspéré.
– Parfois je me demande si tu es normale. Mais qu’est-ce que tu cherches, ma fille ? Tu veux bousiller ton avenir ? Parce que là, tu te conduis comme une sotte. Je vais dire quatre mots à ta grand-mère, car je suis sûr que c’est elle qui t’a mis ces lubies plein la tête. Oui, c’est sûrement elle, avec ses airs de grande dame, toujours plongée dans ses romans à l’eau de rose ! Le pauvre Gaston, il devait en avoir marre de l’entendre gémir à longueur de journée, et lui dire que sa vie n’était pas assez passionnante à son goût.
Mon pauvre père, si tu savais…
– Crois ce que tu veux, papa. Ma décision est prise. Et si c’est le côté financier qui te préoccupe, ne t’inquiète pas, je saurai me débrouiller sans Gilles.
– Ah bon ! Te débrouiller sans Gilles ! Sans appartement, sans voiture, et peut-être même, sans travail ? Où comptes-tu aller ? Revenir à la maison ?
Ce dernier constat et le regard inquiet de sa mère piquèrent Nadejda. Elle ne disposait pas d’un riche pécule sur son compte bancaire, d’accord, mais elle avait sa fierté, et maintenant que le pas était franchi, elle devait continuer sur sa lancée, quitte à le regretter par la suite.
– Si c’est ce qui vous préoccupe le plus, ne vous en faites pas pour ça, je ne reviendrai pas vivre à la maison. Je trouverai bien du travail ailleurs qu’ici.
– Ah, celle-là, c’est la meilleure !
Le ton narquois de son père était blessant mais elle ravala sa salive tentant de ne pas laisser transparaître son soudain désarroi. – Et où comptes-tu aller, dis-nous ?
Elle avait lancé cette phrase en l’air comme ça, plus pour fermer le clapet à son père que par conviction, sans vraiment mesurer la portée de ses mots, mais, comme si c’était un signe du destin, au même moment, défilaient, sur l’écran télé, des images de rêve, hautes en couleurs, celles d’une destination touristique, accompagnées de chants envoûtants. C’est alors qu’elle se souvint des paroles d’Olga  » … construis ton propre univers, plus serein, plus coloré… »
Sa décision était prise. Elle se sentit bien, soulagée, libre et détendue, ce qui eut pour effet de dessiner un joli sourire sur ses lèvres lorsqu’elle s’exclama :
– En Corse !

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